• Conseillé par
    5 novembre 2013

    Angleterre, bourreau

    Un roman qui nous plonge d'entrée de jeu dans l'immédiate après-guerre. Londres n'est pas encore reconstruite, et, au milieu des ruines, la population manque de tout, malgré les tickets de rationnement.
    Seule issue pour une belle femme, la vente de ses charmes. Mais Ruth est loin d'être une femme avisée, elle se laisse facilement embobinée. De plus, elle adore faire des bébés, combinaison qui lui sera fatale.
    On suit en parallèle la vie du bourreau officiel de Sa Majesté. Une vie toute simple avec une femme aimante et la gestion d'un pub pour compléter son salaire. Etre bourreau ne paye pas tant que cela.
    Un roman intéressant par ce qu'il nous apprend de la vie après le Blitz.

    L'image que je retiendrai :
    La débrouillardise de Ruth pour se faire son propre rouge à lèvre en temps de disette.


  • Conseillé par
    16 juin 2013

    Didier Decoin est un des ces auteurs qui possède un vrai talent de narrateur. Dans ce nouveau livre, il s’empare d’un fait réel qui a défrayé les chroniques anglaises dans les années 1950. Et là, je sais que certains d’entre vont tout comme moi du moins au départ effectuer un rapprochement avec "Est-ce ainsi que les femmes meurent ?". L’auteur y relatait l’attitude de voisins lors du meurtre de Catherine Kitty Genovese une nuit de 1964 à New York. Ce livre (ne cherchez pas mon billet, je n’en avais pas rédigé) était à mon sens plus un rapport des faits qu’un roman. Mais avec "La pendue de Londres "Didier Decoin nous offre un roman prenant !

    Pour avoir abattu à bout portant son amant, Ruth Ellis a été pendue en juillet 1955 à Londres . Cette jeune femme dont on connait d’emblée la destinée se trouve prise dans une spirale. Sa beauté n’aura pas laissé les hommes indifférents. En premier lieu son père a abusé d’elle. Puis dans Londres d’après-guerre, mère d’un petit garçon, elle offre ses charmes dans le monde des clubs nocturnes. Elle croit à l'amour. Au vrai et passionné. Hélas, Ruth la blonde peroxydée n’attire que les mauvais amants. Violentée par son mari puis par son amant, elle est manipulée comme un simple jouet de plaisir dans les mains des hommes.
    Celles d’Albert Pierrepoint sont différentes. Il est celui qui passe la corde au cou des condamnés à mort. Un homme méticuleux dont la vie ordonnée s’oppose à celle de Ruth.
    L’auteur se glisse dans la peau de celui qui ôte la vie sur décision de justice, alterne ses pensées et la vie de Ruth. On approche avec appréhension de l’inéluctable, ce moment où leurs trajectoires se croiseront. Et le sang-froid, la maîtrise de soi du bourreau se fissureront.

    Didier Decoin a cette capacité à nous enrôler dans une histoire, à nous tirailler de questions et de sentiments bouleversants. Les pages défilent, on se prend à penser à une autre issue ou à un retournement de situation. Qu’en est-il de la légitime défense de Ruth ? Question qui nous taraude comme elle assaille Albert Pierrepoint. Qui est victime, qui est bourreau ? Un roman où vie et mort sont liées par la justice et où le doute ronge, brise et détruit. Tout simplement saisissant.